Fournir de l’électricité à la Terre depuis l’espace ? C’est le pari qu’ont lancé les chercheurs de l’Agence spatiale européenne, qui ont présenté le projet Solaris : une station solaire composée de panneaux photovoltaïques en orbite autour de la Terre.

Et si les panneaux solaires de demain étaient installés dans l’espace ? C’est ce qu’ont proposé les scientifiques en charge du développement d’une centrale solaire spatiale européenne, baptisé projet Solaris, lors du conseil ministériel de l’Agence spatiale européenne (ESA), qui s’est tenu à Paris les mardi 22 et mercredi 23 novembre 2022. L’objectif de cette station solaire ? Capter, grâce à des panneaux photovoltaïques, l’énergie produite par le Soleil dans l’espace puis la transférer à la Terre pour la transformer en électricité.

« Ce n’est plus de la science-fiction »

« Ce n’est plus de la science-fiction, mais un concept qui pourrait très bientôt faire partie de notre futur », s’enthousiasme Sanjay Vijendran, physicien responsable du projet Solaris, auprès du magazine L’Usine Nouvelle . Si les ministres des 22 pays membres de l’ESA valident et financent le projet, les panneaux photovoltaïques pourraient être placés en orbite et opérationnels autour de la Terre à 36 000 km au-dessus de nous, d’ici 2040.

« Cela garantirait à l’Europe de devenir un acteur clé – et potentiellement un leader – dans la course internationale vers des solutions évolutives d’énergie propre pour atténuer le changement climatique », explique l’Agence spatiale européenne sur son site.

Josef Aschbacher, directeur général de l’institution, estime que « l’énergie solaire depuis l’espace pourrait “booster” l’Union européenne en termes de décarbonisation de l’énergie », dans des propos rapportés par le site d’information sur les sciences et les nouvelles technologies Science Post.

À la BBC, la radiotélévision britannique, Josef Aschbacher a déclaré que l’énergie solaire de l’espace pourrait être d’une aide « énorme » pour faire face aux futures pénuries d’énergie. « Nous devons nous convertir à des économies neutres en carbone et donc changer notre façon de produire de l’énergie et surtout réduire la part des combustibles fossiles dans notre production d’énergie », a-t-il ajouté.

Capter la lumière solaire 24 heures sur 24

Les aléas climatiques font peser des contraintes sur les panneaux solaires terrestres. Nuages, alternance entre le jour et la nuit, absorption de la lumière du soleil par le sol… Autant de facteurs qui ne permettent pas d’optimiser la captation de la lumière émise par le soleil sur notre planète. L’installation de panneaux photovoltaïques dans l’espace permettrait de résoudre ces problèmes.

« La lumière solaire est en moyenne plus de dix fois plus intense au sommet de l’atmosphère qu’elle ne l’est à la surface de la Terre », explique le site de l’ESA. Et à une hauteur suffisante, les satellites pourraient faire face au Soleil 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 pour capter le maximum de lumière possible.

Les études commandées par l’ESA estiment que cet ensemble solaire « pourrait répondre à 30 % des besoins européens en énergie », rappelle Science Post. Mais pour générer des niveaux d’énergie solaire optimaux et économiquement viables, précise encore l’agence spatiale, cette installation nécessiterait une constellation d’une dizaine de satellites au moins dix fois plus lourds que la Station spatiale internationale(ISS).

Un satellite pour alimenter un million de foyers

Un satellite solaire s’étendrait alors sur un kilomètre de diamètre, soit l’équivalent d’une dizaine de terrains de football, là où l’ISS ne dépasse pas 108 mètres de long, compare la BBC. « Dans le passé, en raison des coûts de lancement élevés, les satellites solaires n’étaient pas considérés comme économiquement compétitifs par rapport aux solutions terrestres », rappelle l’agence spatiale.

Mais avec le projet Solaris, l’ESA assure qu’un seul satellite d’énergie solaire générerait environ 2 gigawatts d’électricité, l’équivalent d’une centrale nucléaire conventionnelle, capable d’alimenter plus d’un million de foyers. En comparaison, il faudrait plus de six millions de panneaux solaires à la surface de la Terre pour générer la même quantité.

Les Européens ne sont pas les seuls à s’intéresser à cette innovation. En 1941, dans sa nouvelle intitulée Raison, l’auteur de science-fiction Isaac Asimov imaginait que les hommes captaient l’énergie solaire dans l’espace pour la rediriger sur notre planète. Dans les années 1990, selon Le Figaro, la Nasa avait étudié un tel projet avant de l’abandonner. Plus récemment, l’Académie chinoise de technologie spatiale avait déclaré en 2019 vouloir construire la première centrale solaire au monde dans l’espace d’ici 2035. La course mondiale aux panneaux solaires spatiaux est lancée.

Source : article Comment des centrales solaires spatiales pourraient alimenter la Terre en énergie par Eva Leray, L’édition du soir, Ouest France, 30 novembre 2022